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Le blues du Delta
A la fois rural dans ses tout débuts puis très rapidement aussi urbain, le blues du delta est incontestablement le blues originel et le plus traditionnel.
Early this mornin'
When you knocked upon my door
Early this mornin', ooh
When you knocked upon my door
And I said, "Hello Satan,
I believe it's time to go."
"Me And The Devil Blues" - Robert Johnson
Un peu de géographie
Le delta du Delta blues n’est pas exactement situé sur le delta du Mississippi. C’est en fait un triangle dont les pointes sont Memphis, Vicksburg ainsi que le fleuve Mississippi et son affluent la Yazoo River. Cette bande de terre fertile mais perpétuellement en proie aux crues du fleuve a été colonisée très tardivement. D’abord octroyée aux amérindiens dont principalement les Cherokees, elle leur fut reprise lorsque le gouvernement entreprit de la mettre en valeur après la guerre de sécession. La plupart des Cherokees émigreront vers l’Oklahoma et ceux qui resteront seront considérés comme « gens de couleur » au même titre que les noirs. De ce fait nombre de bluesmen de la région ont des origines Cherokees (on peut citer Muddy Waters ou R.L. Burnside) et les revendiquent. Bien qu’affranchis, le statut des noirs reste très précaire et cette installation dans le delta n’est finalement qu’une illusion et une étape vers les régions du nord facilement accessibles par le chemin de fer (l’Illinois Central Railroad remonte toute la rivière Mississippi et va même jusqu’à Chicago. D’ailleurs il sera chanté dans certains blues)
Spécificités du blues du delta
La dureté de la vie et la pauvreté font de ce blues un blues très rude, simple et lancinant. L’écriture est très poétique avec l’utilisation de nombreuses métaphores et le chant s’élève comme une mélopée mélancolique en restant assez austère. L’improvisation étant de mise il n’est pas rare que les blues traditionnels durent pas loin d’une demi-heure. La guitare est avant tout rythmique avec une basse puissante et un nombre réduit de notes (parfois une seule) même si le bottleneck ou le slide sont souvent utilisés. L’harmonica viendra par la suite accompagner la guitare mais l’instrument le plus souvent utilisé au début sera la « washboard » (planche à laver frottée par un galet de bois)
Les bluesmen
Ce sont souvent des semi professionnels qui laissent une grande part à l’improvisation. Ils sont seuls dans leurs déplacements et sont rejoints par des petits orchestre lorsqu’ils donnent une représentation dans une gare, un camp, un bar ou un bordel (c’est d’ailleurs là l’origine de l’introduction du piano dans le blues du delta : de nombreux camps avaient leur propre pianiste chargé d’animer le bar d’où l’origine du style barrelhouse). Ils suivront les migrations de population d’abord de la campagne vers les villes comme Memphis, Saint Louis, Atlanta ou la Nouvelle Orleans en raison de l’accroissement de la production d’acier et de coton puis vers le nord par la suite.
Quelques Noms
Charley Patton (1891-1934), l’un des précurseurs, auprès duquel de nombreux guitaristes viendront apprendre leur métier à la Dockery’s Plantation où il vivait.
RL Burnside (1926-2005)
Sam Chatmon (1897-1983)
Big Boy Crudup (1905-1974), son style nerveux en fait l’un des précurseurs du futur rock’n’roll
John Lee Hooker (1917-2001)
Howlin’ Wolf (1910-1976), une voix à nulle autre pareille
Son House (1902-1988), spécialiste du bottleneck
Elmore James (1918-1963), l’un des plus talentueux guitariste de blues
Skip James (1902-1969), l’un des bluesmen les plus originaux ; à la fois chanteur compositeur, guitariste et pianiste
Robert Johnson (1911-1938), maître de la slide guitare ; il fût le premier à composer des chansons de trois minutes spécialement formatées pour les disques 78 tours.
BB King (1925), l’un des derniers géants encore vivant.
Mississippi Fred McDowell (1904-1972)
Mississippi John Hurt (1892-1966)
Muddy Waters (1915-1983) alias McKinley Morganfield. Sans doute celui qui a popularisé le blues auprès du grand public.
Bukka White (1909-1977)
Big Joe Williams (1903-1982)